100 000 places en moins et 2 fois plus de patients en 20 ans : Citoyens, soyez patriotes. N’encombrez pas les urgences, mourez chez vous !

vendredi 7 juin 2019
par  SUD Éduc

Grève nationale aux urgences : soignants et patients en danger
Aux urgences de Lons-le-Saunier, la situation est devenue tellement critique que 70 % du personnel s’est mis en arrêt maladie, complètement lessivé. Face à l’afflux de patients, les autorités françaises ont carrément envoyé les forces de l’ordre au domicile des soignants pour les réquisitionner et les obliger à revenir à l’hôpital !

Alerte santé : Le mouvement de grève des urgences se propage dans tout le pays. Le personnel soignant dénonce la précarité grandissante de leurs conditions de travail qui met en danger la vie des patients et urgentistes.

Démarrée le 18 mars aux urgences de l’hôpital Saint-Antoine à Paris, le mouvement s’étend désormais à toute la France avec 84 services en grève parmi les plus grands CHU du pays. Infirmiers, aides-soignants et médecins étaient mobilisés aujourd’hui dans une grande grève nationale pour alerter sur la dégradation alarmante de leurs conditions de travail : personnel en sous-effectif, 100 000 lits en moins en 20 ans, manque de place, fermeture de services déjà saturés, et ce alors que la fréquentation des urgences ne fait qu’augmenter !

En effet, les urgences ont vu leur fréquentation doubler en vingt ans, avec près de 21 millions de passages enregistrés en 2016. A Paris, on observe une augmentation régulière de 5% par an. Pourtant, la Direction générale de l’AP-HP a prévu de supprimer 1000 postes par an jusqu’en 2023, après en avoir déjà fermé 3500 entre 2014 et 2018. A bout, le personnel des urgences est contraint de courir dans tout l’hôpital pour trouver des lits aux patients, et n’a plus assez de soignants pour traiter correctement les malades. A cause de ces conditions dangereuses, plusieurs personnes sont décédées, comme cette femme oubliée sur un brancard à l’hôpital de Lariboisière, ou cet homme qui s’est asphyxié à l’hôpital public de Georges-Pompidou.

« Nous souffrons d’un cruel manque de personnel avec le doublement du nombre de passages dans les urgences en 15 ans, alors que les Agences Régionales de Santé (ARS) ferment des lits et des services à tour de bras. Bien sûr, nous avons besoin de moyens supplémentaires, mais nous avons d’abord besoin qu’on arrête de supprimer des postes et des lits ! En décembre 2018, la Ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé qu’elle « débloquait 415 millions d’euros » pour faire face à la situation, alors que nous avons eu 960 millions d’euros de coupes budgétaires la même année ! » nous explique au téléphone Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des Médecins Urgentistes de France

Aux urgences de Lons-le-Saunier, la situation est devenue tellement critique que 70 % du personnel s’est mis en arrêt maladie, complètement lessivé. Face à l’afflux de patients, les autorités françaises ont carrément envoyé les forces de l’ordre au domicile des soignants pour les réquisitionner et les obliger à revenir à l’hôpital !

« Il faut le voir pour le croire…Les patients s’entassent dans les couloirs : des enfants avec leur plaie au doigt, des papys venus de la maison de retraite et qui ont du mal à respirer, des cinquantenaires avec une douleur thoracique, donc possiblement un infarctus… Et tout ce petit monde cohabite des heures et des heures, et se demande quand ils verront le médecin. Le personnel est à bout de souffle. Vraiment. Ils ont les yeux rouges et sont à deux doigts de craquer de nouveau. Ils tiennent à peine debout. Certains membres du personnel ont été amenés par la police. » écrit un jeune médecin interne à Médiapart en revenant d’une garde aux urgences de Lons-Le-Saunier.

Après avoir condamné sur FranceInter les urgentistes en grève hier, la ministre de la santé Agnès Buzyn a fait volte-face ce matin en promettant au Congrès Médical Urgences qu’elle allait mettre en place une mission nationale chargée d’élaborer une « stratégie d’ensemble » pour « adapter nos urgences aux nouveaux besoins de santé ». Elle a aussi annoncé débloquer une prime de dangerosité d’un peu plus de 70€ net pour le personnel, bien en-dessous des 300€ réclamés par les soignants.

« Nous n’avons pas besoin d’une mission nationale pour savoir ce dont on a besoin ! Ce qui s’est passé à Lons-le-Saunier est inacceptable ! On voit bien que nous sommes face à un gouvernement autoritaire, on l’avait déjà constaté avec le fichage des gilets jaunes dans les hôpitaux, et cette tendance ne fait que se renforcer. Le fait que la Ministre de la Santé vienne faire des déclarations à un congrès de médecins, tout en refusant de recevoir le collectif inter-urgences et les syndicats est particulièrement symbolique ! Un congrès n’est pas un lieu adapté pour résoudre un conflit social aussi grave ! » précise au téléphone Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des Médecins Urgentistes de France

Face au manque de moyens et de considération du gouvernement, de nouveaux établissements hospitaliers se décident également à rejoindre le mouvement de grève. Une autre manifestation est prévue le 11 juin, qui s’étend cette fois-ci à tous les services des hôpitaux, afin d’éviter de nouveaux drames.