La théorie de l’inclusion et les réalités d’une école de l’exclusion.

vendredi 5 avril 2019
par  SUD Éduc

La politique éducative faite de réformes successives depuis des années, sans bilan à proprement parler, se résume à plus de travail, plus de responsabilités, moins de droits, moins de moyens et des salaires gelés.
Le désengagement de l’État a favorisé l’expansion des écoles privées, signe de la déliquescence du système éducatif démocratique que nous connaissons bien dans beaucoup de nos pays d’exercice et au sein même de l’AEFE.
De fait, une vraie politique d’inclusion devient possible, mais uniquement pour les familles qui en ont les moyens. Pour les autres, la responsabilité repose sur des enseignants qui doivent gérer des classes pléthoriques et d’une grande hétérogénéité.
Finlandaise sur les exigences mais pas sur les moyens, mais aussi Norvégienne pour le civisme, Belge ou Canadienne dans la gestion des élèves à besoins particuliers, Italienne au moment des réformer le BAC ou Anglo-saxonne dans le financement des établissements privés, notre éducation Nationale s’accommode très bien des exigences des systèmes pris comme "modèle" mais beaucoup moins des compensations pour les salarié-e-s, qui devraient aller de paire.
Le manque de moyens, les conditions de travail devenues par certains aspects insupportables, les bas salaires et les conflits permanents avec les parents, les élèves et les hiérarchies directes et/ou intermédiaires, font que le modèle Français, loin d’être innovant, se contente de n’être qu’une pâle application des choix pédagogiques et organisationnels d’autre pays qui, eux, se sont vraiment donné les moyens de développer une véritable ingénierie de l’Éducation.

Les enseignants dans la rue contre la loi sur l’école (source Le Figaro)

REPORTAGE - Pour la troisième fois en un mois, la colère des professeurs contre le projet de loi Blanquer s’est exprimée partout en France.

Aux cris de « Blanquer, le grand fossoyeur » ou « Stop à la politisation de l’éducation », plusieurs milliers de professeurs ont défilé jeudi à Paris, et quelques centaines dans d’autres villes. Cette grève nationale des professeurs d’école contre le projet de loi Blanquer a été suivie par 15% d’entre eux, selon le ministère de l’Éducation, 25% selon le premier syndicat du primaire. Un chiffre assez conséquent mais plus faible que lors de la précédente grève du 19 mars. Le SNUipp-FSU note une importante mobilisation à Paris avec 70% de grévistes (37% selon le rectorat).

Comme beaucoup de ses collègues, Camille, enseignante de CM2 dans une école d’Asnières (Hauts-de-Seine), est venue manifester à Paris pour protester contre des conditions de travail qu’elle juge « très difficiles » en raison du profil de ses élèves. La jeune femme de 27 ans ne s’en sort pas face à un enfant agressif « avec troubles du comportement ». « Il est brillant sur le plan scolaire mais ne se contrôle pas du tout, il fait des crises à répétition, raconte-t-elle. À tel point que, exaspérée, j’ai failli lundi lui mettre une baffe. »

Confrontée à son désarroi, pour seule réponse, sa conseillère pédagogique départementale lui a conseillé de se mettre en arrêt maladie. Approuvée par une collègue, elle estime que l’enfant devrait aller dans une école spécialisée (IME, ITEP), des structures qui, critique-t-elle, « ferment ou proposent de moins en moins de places pour des raisons budgétaires ». Elle s’estime par ailleurs « insuffisamment formée en psychologie de l’enfant pour gérer ce type de handicap ». Et cela ne devrait pas s’arranger, selon elle, puisque la loi permettra à des étudiants de remplacer des profs absents, dès la première année de master. « Depuis la loi de 2005, on nous demande d’inclure tous les enfants handicapés et de faire aussi bien que l’école finlandaise, alors que nous avons 30 enfants par classe ! renchérit Anne-Marie, directrice d’école à Lardy (Essonne). Depuis 20 ans que j’enseigne, cela va de mal en pis. » L’an prochain, dans son école, une assistante de vie scolaire devra se partager entre plusieurs enfants handicapés « qui auraient pourtant besoin d’une aide à temps plein ».
« La goutte qui fait déborder le vase »

Même si Jean-Michel Blanquer a voulu rassurer sur ces points de la loi, elle craint une disparition des écoles maternelles et des directeurs d’école. « Je suis une espèce en voie de disparition ! », plaisante-t-elle. Derrière la création d’« établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux », syndicats et enseignants craignent la mise sous tutelle des écoles, sous l’autorité du principal de collège, et la disparition des directeurs d’école, lien entre les familles, les élus et l’école.

« C’est grâce au directeur que nous avons une cohésion d’équipe forte. Il nous décharge de l’administratif et fait l’interface avec les parents d’enfants compliqués »

Cette suppression redoutée, c’est « la goutte qui fait déborder le vase » pour de nombreux manifestants. « Les directeurs gèrent énormément de choses : les inscriptions, la communication avec l’inspection. Si ce rouage administratif disparaît, on va faire comment ?, interroge Élise, professeur à Asnières (Hauts-de-Seine). Téléphoner au principal du collège situé à deux kilomètres ? » Même argument pour Clara et Adélie, de Vigneux à Athis-Mons (Essonne) : « C’est grâce au directeur que nous avons une cohésion d’équipe forte. Il nous décharge de l’administratif et fait l’interface avec les parents d’enfants compliqués. »

Plus épars, venus de Bondy, d’Ivry-sur-Seine ou de Créteil, des professeurs du secondaire protestent dans le cortège contre la réforme du lycée, d’autant plus mal vécue que « les effectifs d’élèves augmentent alors que des postes de profs sont supprimés », déplorent Caroline et Valdo. Des enseignants de collège et de lycée qui étaient un peu plus de 4%, au niveau national, à faire grève, selon la Rue de Grenelle.